Nous vivons désormais à l’époque de l’Anthropocène. Ce terme, nous la devons à Paul Crutzen, prix Nobel de chimie néerlandais pour ses travaux sur la destruction de la couche d’ozone. Il l’a prononcé lors pour la première d’une conférence scientifique à Mexico en 2000, agacé par l’utilisation répétitive du terme Holocène par le président de séance (cf. citation ci-dessus).
A quoi fait-il référence ? A une nouvelle époque géologique, rien que ça. Jusqu’à une période récente et depuis environ 10 000 ans, nous étions à l’époque de l’Holocène, période globalement très stable (au niveau climatique notamment) et donc propice à l’essor de l’humanité. Mais depuis, des changements majeurs, comme le changement climatique, sont intervenus et c’est l’Homme (du grec, anthropos) qui en est responsable.
Pour caractériser une nouvelle époque géologique, les géologues recherchent des « points stratotypiques mondiaux » (PSM) : il s’agit de marqueurs chimiques ou autres que l’on retrouve au niveau des couches géologiques. Si l’on recherche le point de départ de l’Anthropocène, il s’agit donc de retrouver des marqueurs laissés par l’Homme. Il existe des débats scientifiques passionnés sur le point de départ de cette nouvelle époque. En effet, cela fait déjà bien longtemps que l’Homme influence son environnement (ne serait-ce que par les pratiques agricoles notamment). Une date qui pourrait être retenue par exemple se situe autour des années 1950 : les très nombreux essais nucléaires réalisés pendant la guerre froide ont en effet laissé des traces de radionucléides partout sur Terre (notamment dans les cernes des arbres). Une autre date envisagée pourrait être aussi le démarrage de la révolution industrielle dans les années 1760, le marqueur principal correspondant ici à des cendres volantes de charbon.
Un autre concept a été développé en parallèle par l’IGPB [a]International Geosphere-Biosphere Programme pour caractériser l’influence humaine sur la Terre, celui de la Grande Accélération. Les chercheurs de l’IGPB ont découverts que la plupart des données observées ont connu une très forte accélération depuis les années 1950. Parmi ces données, on trouve par exemple la concentration de dioxyde de carbone, celle du méthane, la perte de forêt tropicale ou encore la perte d’ozone stratosphérique. Ces indicateurs physiques ont été croisés avec des divers indicateurs socio-économiques (par exemple, l’augmentation de la population, la consommation d’eau ou encore le PIB) qui ont eux aussi connu des modifications exceptionnelles depuis les années 1950. Cette corrélation met en évidence l’influence considérable qu’ont eues les sociétés humaines sur leur environnement terrestre en moins d’un siècle.
Cette empreinte humaine colossale (dans une période de temps aussi brève) nous amène aujourd’hui à une crise écologique majeure dont nous allons décrire les mutliples facettes dans les chapitres qui suivent.
Notes de bas de page
↑a | International Geosphere-Biosphere Programme |
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